mardi 12 avril 2011

Réunion Pikler : Le temps du repas, temps de plaisir et de communication.

Jeudi 7 avril a eu lieu une soirée débat de l’association Pikler loczy de France dont le thème était :


Le temps du repas, temps de plaisir et de communication.

J’y étais bien sûr, calepin en main, et cette fois c’est Michèle Célarié qui menait les débats. Je vais commencer par vous la présenter sommairement car tout comme Sylvie Lavergne qui officie habituellement lors de ces soirées, son dynamisme, son implication, et son envie de transmettre son savoir et ses convictions ont enchanté l’assistance, composée ce soir là de personnes venant d’accueils collectifs, d’assistantes maternelles, d’étudiants et …. d’une maman !!

Michèle Célarié est donc une psychomotricienne désormais à la retraite. Elle a travaillé principalement dans des Centres Médico Psychopédagogiques en tant que thérapeute et parallèlement elle a enseigné dans une école d’éducateurs de jeunes enfants. C’est d’ailleurs, lorsqu’elle partait en visites de stage pour ses élèves qu’elle a pu observer et voir évoluer les tout petits dans des lieux d’accueil collectif. Depuis qu’elle n’est plus en activité, elle a rejoint les rangs des formateurs de l’association Pikler.

Nous avons donc débattu toute la soirée des repas qui doivent être un temps de plaisir amenant un sentiment de bien être profond. Il ne faut pas oublier que pour un bébé, avoir faim est une douleur. Il convient donc d’apaiser cette douleur dans la convivialité pour en faire un moment de bonheur. Il en sera reconnaissant. Mais pour cela il faut que certaines conditions soient réunies. On devra répondre à des besoins fondamentaux quelque soit l’âge de l’enfant.

I Le besoin de sécurité matérielle et affective

Le premier, c’est le besoin de sécurité matérielle et affective. Si il n’est pas en sécurité, l’enfant ne mange pas. Et pour cela il lui faut différents repères.

1° Tout d’abord, il lui faut un repère de personne. Il est important que ce soit toujours la même personne qui lui donne à manger (bien sûr, ce problème se pose moins chez une assistante maternelle) Plus l’enfant est petit plus c’est important car en grandissant il sera capable de lui-même de se diriger vers une autre personne pour trouver la sécurité.

2° Il lui faut aussi un repère dans l’espace. Il doit toujours savoir où il est. La première année, le repas doit toujours être donné sur les genoux en prenant garde de faire toujours les mêmes choses au même endroit dans le même fauteuil. Quand il est en âge de manger à table (quand il sait s’asseoir tout seul) il doit avoir une place à table avec une négociation possible si l’enfant veut changer de place. Quand dans un multi-accueil, un enfant ne vient pas régulièrement, la priorité doit être donnée à celui qui est là tout le temps. Il n’est pas question de lui dire « aujourd’hui, tu prêtes ta place au copain » car le petit enfant n’est pas encore dans la compréhension du prêt ou du partage.

3° Le repère dans le temps est aussi très important. Comme la gestion du temps vient en dernier dans les repères des enfants, il faut lui permettre de matérialiser le temps en lui donnant des repères dans la matinée. C’est très important ; la première année par exemple, le temps du repas est le seul moment d’intimité long que le bébé passe avec nous. Il faut alors établir un tour de rôle, tour de rôle qui doit être élaboré après une observation minutieuse pendant le temps d’adaptation. On fera toujours manger les enfants dans le même ordre. Beaucoup d’avantages peuvent découler de cette façon de faire. Pour l’enfant, il peut ainsi anticiper. Pour nous, cela évite la culpabilisation qui peut arriver si deux enfants pleurent en même temps. On est capable d’expliquer à l’enfant que son tour viendra comme d’habitude alors qu’on peut avoir le sentiment de ne pas avoir commencé par le « bon » si les enfants ne sont pas listés.

II Les besoins physiologiques
De même que l’enfant a besoin de respirer, boire, dormir, il a besoin de manger. Ceci sera vécu de façon différente selon les personnes. Chacun aura une perception très personnelle en lien avec sa propre histoire. Il y aura un travail d’observation à faire devant un enfant qui ne mange pas.

III les besoins sociaux

On parle de socialisation primaire quand l’enfant est dans sa famille élargie. On parlera de socialisation secondaire quand il s’agira de celle qu’il trouvera avec nous (« accueillants », mais aussi avec ses pairs, les autres enfants).

Quelque soit le lieu d’accueil, on doit penser que l’enfant est un individu. Le temps du repas est un temps privilégié pour s’adresser à chacun : le nommer, lui parler de sa vie, ne pas se contenter de lui donner des ordres. C’est très important car de la qualité de la vie collective qu’on donne aux enfants va dépendre la qualité de sa vie sociale future. Pour les plus âgés, distribuer, donner, participer, c’est de la socialisation.

IV Le besoin d’être actif
La psychomotricité, c’est le lien entre l’intention et l’action : les enfants vont mettre en actes leurs intentions. C’est cela être actif. Mais pour permettre cela, il faut que les bonnes conditions soient réunies.

1° le cadre

Tout d’abord il faut un cadre adéquat. Pour un tout petit, le biberon étant donné dans les bras, nous devons nous installer dans un endroit protégé. Si l’adulte est bien installé, le biberon sera donné dans de bonnes conditions. Il faudra créer les conditions pour être tranquille avec le bébé en s’isolant des plus grands. On peut par exemple occuper les grands avec des jeux spécifiques que l'on sortira exclusivement à ces moments là.

Pour les plus grands, il faudra une table à la bonne hauteur. L’enfant doit avoir les pieds qui touchent le sol. On choisira plutôt un tabouret et dans tous les cas, jamais de chaises avec des accoudoirs car l’enfant ne peut pas s’y asseoir seul. En tant qu’adulte nous préférons souvent nous asseoir sur une chaise car nous souffrons souvent du dos, mais l’enfant lui n’a pas ce problème. Chez « Pikler » on n’est pas favorable à la chaise haute car l’enfant est piégé dedans. Si on pense que c’est important qu’il soit actif, on doit lui donner les moyens d’être autonome, de gérer son repas. Mais nous devons toutefois faire attention à la fausse autonomie. Ce n’est pas parce qu’un enfant arrive à manger tout seul un jour, qu’il le fera tout le temps. Il faut lui donner la possibilité d’un retour en arrière. Il faudra l’accompagner plutôt que l’aider. On n’utilisera pas plus le transat (qui peut à la rigueur être un lieu de passage mais jamais un lieu de séjour). Dans un transat, l’enfant n’a pas les moyens de vous envoyer un signal pour vous dire qu’il n’en veut plus (il ne peut pas bouger les bras, ni reculer la tête). Le repas sera donc pris sur les genoux jusqu’à ce que l’enfant puisse s’asseoir seul. Lorsqu’il passe à table, l’adulte doit lui aussi être assis, toujours à une longueur de bras de l’enfant.

2° Les instruments

Pour un bébé, en ce qui concerne le biberon, on va prendre soin de le tenir près du fond, pour laisser à l’enfant la possibilité de positionner lui aussi ses mains dessus et le repousser quand il n’a plus faim. Ainsi même le tout petit est actif.

Pour les plus grands, on va utiliser :

- des verres transparents afin qu’il voit ce qu’il y a dedans. C’est l’adaptation oculo-manuelle très importante pour le développement psychomoteur. Ils doivent être adaptés à la main de l’enfant (pas trop gros). Une personne dans l’assistance nous a conseillé un modèle de chez nos amis les suédois (sont forts ces suédois) mais en cherchant bien chez Duralex il doit y avoir les mêmes !! Michèle Célarié nous a précisé qu’elle en avait vu de très bien dans une collectivité et qu’il s’agissait de verres à vin blanc ;

- des assiettes creuses pour que l’enfant puisse remonter le long des bords ;

- des cuillères normales en métal, surtout pas tordues et pas « molles » (c’est inutile).

Il faut bien se rappeler que de la façon dont ils tiennent les instruments va dépendre la façon dont ils tiendront leur stylo plus tard. D’ailleurs on notera qu’on ne se sert pas de verres avec bec et anses. D’abord, ils sont souvent opaques et en plus ils font réaliser à l’enfant un « faux geste » qu’il ne retrouvera pas plus tard. On ne tient pas un vrai verre comme on tient ce genre de matériel. Cela ne sert donc à rien.

3° le contenu

Pour ce qui est du biberon, il ne faut mettre que du lait à l’intérieur pour que le bébé puisse anticiper ce qu’il va boire. Il ne faut pas de changement de goût. Cela participe à la mise en place de son sens gnosique : le fait de reconnaître un objet et d’en saisir la signification. Il est d’ailleurs conseillé lorsque l’on doit donner un médicament par exemple, de se servir d’un autre biberon très différent.

Pour le contenu des assiettes, il faut faire attention aux quantités : toujours en mettre peu. L’enfant aura ainsi la fierté de finir. On note d’ailleurs que si l’on en met trop, cela peut décourager l’enfant qui ne touchera même pas son plat. Il faut faire attention à ne pas mettre le contenu de l’assiette à la poubelle devant l’enfant (penser alors au message que l’on véhicule en faisant ce geste). Lorsqu’un enfant ne veut pas d’un plat, il vaut mieux ne pas insister, proposer aux autres enfants, et revenir ensuite au premier qui prendra peut être exemple sur les copains.

La soirée s’est terminée sur de nombreuses questions, notamment sur l’ordre des aliments, la présentation des plateaux repas….. mais je ne vais pas tout vous raconter. Je préfère que vous  participiez à une des réunions pour vous rendre compte par vous-même. Bon, c’est vrai, il n'y en a pas partout !!! Mais renseignez vous quand même, on ne sait jamais :


(Illustration : Klara Pap, tirée du livre Repas Repos de Maria Majoros et Anna Tardos)

3 commentaires:

  1. MERCI beaucoup ... Je cherchais une formation... grâce à votre article, j'ai un super choix !

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  2. Bonjour, puis-je partager votre article sur mon blog ? Merci pour votre réponse, quelle qu'elle soit !! A bientôt !!

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